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melimelodit
21 avril 2006

CONCOURS DE CIRCONSTANCES

Mercredi soir. Embouteillages d’idées dans ma tête. L’avenir. L’argent. L’amour. Téléscopages de mots en A. Embouteillage des non-vacanciers autour de moi sur la rocade. Mon portable me fait un clin d’œil. WonderMarie : « Ola à tous, j’ai une place dispo pour aller voir Don Quichotte demain soir au grand théâtre à 20 heures à la générale. Le premier à répondre à ce sms aura la grande chance de m’accompagner ». Merci les embouteillages en trente secondes j’ai répondu « Moi ». Une heure plus tard : « Standard saturé, arrétez les sms, et les appels, La grande gagnante est …Sylvie la méli-lélo, merci à tous de votre participation, pas de lot de consolation pour les autres, bizz à tous ». Envolées les idées noires, envolés les embouteillages dans ma tête, envolée l’envie de caverner. Demain je vais à l’opéra. Je reprendrai les soucis plus tard, pour l’instant je pose les valises de grisaille et je rêve. De toutes façons ils m’attendront et sauront me rattraper en temps voulu.

Jeudi soir. 19 heures. TDC1 qui n’est pas partie en Bretagne avec son père et a préféré rester à Bordeaux seule avec sa m’manmôm m’attends de pied ferme. Elle a passé l’aprèm à ranger les placards de la maison. C’est une hyper manique de l’ordre et du rangement et avec sa môm’ elle a un boulot monstre. Elle a classé mes pulls, mes robes, mes pantalons, mes tee-shirts, mes pagnes… Sur mon lit elle a posé ma belle robe cop’copine noire et rouge. « On ne va pas à l’opéra en jean, m’man !!! » J’ai beau lui dire que c’est plouc de s’habiller pour une générale elle n’en démord pas. Je trouve ça attendrissant alors je passe la robe. Mais quand je veux mettre mes chaussures plates rouges, elles ont disparu. TDC1 me présente mes sandales noires à hauts talons, celles qui sont faites pour jouer les belles de nuit, mais sûrement pas pour marcher. Maman-Cendrillon part donc à l’opéra, habillée par sa fée-TDC1, en espérant ne pas avoir l’air trop endimanchée. Bien sûr, les embouteillages, bien sûr, les minutes qui filent, bien sûr, les places autour du grand Théâtre toutes prises, et bien sûr, le parking souterrain pour finir. Alors Maman-Cendrillon court avec ses godasses trop hautes sur le pavé de la rue Saint-Rémi, se tord les chevilles, perd son étole, transpire, pendant que WonderMarie, la harcèle de sms, pour lui dire que si elle n’accélère pas elle va rater Don Quichotte. Ouf les marches du Palais sont enfin à sa portée, le dernier appel de la clochette sonne pour inviter les derniers spectateurs à se grouiller les fesses. Il nous faut monter jusqu’au paradis pour trouver nos places. J’aime cette idée. A l’époque de la tribu(pour ceux qui suivent) notre devise était : « Le paradis ou rien ». Ce soir ce sera le Paradis pour WonderMa et seules rescapées de la tribu éclatée. Les danseurs apparaissent, l’orchestre donne le ton de la soirée, hispanisante bien sur. J’ai toujours été fascinée par la danse classique. Emue aux larmes souvent. Un flot de souvenirs me revient. Marie me montre dans le corps de ballet, Coco, la copine d’un copain, qui a filé les places. En même temps que je m’emplis de la musique et des couleurs du spectacle, je pense au passé. J’ai été une petite danseuse. Peu de classique. Mais surtout durant une dizaine d’années, j’ai navigué dans une troupe entre le modern jazz et les claquettes, et le folklore aussi. J’aimais la pression du moment où l’on arrive sur la scène le cœur serré de trac, et où tout à coup on fait partie du spectacle. C’était une émotion que j’aimais. Il est vrai que j’ai plus souvent vu les salles de spectacle depuis la scène que depuis les fauteuils quand j’étais plus jeune. Je retrouve d’ailleurs ce plaisir avec le chant. Il y avait longtemps que je n’avais eu ce bonheur de voir de la danse classique. Marie m’a fait là un si beau cadeau. Je ne fixe pas forcément mon attention sur les premiers danseurs car je sais que tout le monde les regarde. Je regarde plutôt les autres, dans le ballet, car je sais qu’eux aussi ont travaillé, qu’eux aussi ont le trac, et qu’eux aussi font la beauté du spectacle. Mon esprit s’évade parfois, vers mon enfance. Je pense à ce jour où notre école de danse avait invité des danseurs de Roland Petit, et ou j’ai vu Denis Ganyo, danser Meddle des Pink Floyd. Les larmes coulaient sur mes joues, quand Mireille Bourgeois la danseuse, est entrée sur scène, si frêle, si blanche. J’aurais aimé être à sa place. Puis l’année suivante ce furent Noella Pontois et Mickael Denard, et là je n’ai pas été émue, tant lui était exécrable et prétentieux. Plein d’exigences et de caprices à la con. Les deux premiers avaient mangé avec nous, dansé avec nous, parlé avec nous, les deux suivants ne nous avaient pas regardés, et étaient restés enfermés dans leurs loges. Quand la petite fille était venue offrir les fleurs à la fin du spectacle, Mickael Denard ne lui avait même pas souri.

En regardant Don quichotte et ses danseurs, je pensais à cette petite fille si timide d’une dizaine d’années, qui était la meilleure danseuse de l’école. Elle était partie à Paris à l’opéra avec les petits rats, mais trop loin de sa famille elle était vite revenue à Bordeaux quelques temps plus tard. Où est-elle aujourd’hui ? Corine….Corine… tiens je ne sais plus son nom. Ce soir, des années plus tard l’émotion me revient de cette envie d’être sur la scène. Mais là je suis si heureuse dans le fauteuil du paradis. WonderMa est un peu confuse car elle croyait m’avoir offert une place pour écouter un opéra. Elle ne sait pas à quel point la danse me fait AUSSI plaisir.

A l’entracte je jette un œil sur le programme, je lis les noms de tous les danseurs, quand mon œil se pose sur une certaine Corine L. du corps de ballet. Je demande à WM si c’est elle qui a offert les places. C’est elle. Ben voilà le nom de la petite fille qui a offert le bouquet il y a 30 ans… c’est celui-là. Hasards et coïncidences. J’ai regardé les deux autres actes encore plus émue que pour le premier,et je revoyais sans cesse cette petite fille qui était « l’étoile » de notre école de danse, timide étoile, tremblante étoile seule sur scène à 10 ans. Aujourd’hui la voilà souriante, sûre des ses gestes, danseuse. J’aime ce genre d’histoire, quand la vie ressemble a un fil, qui croise d’autres fils, s’en éloigne et le retrouve par le plus grand des hasards.

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